Bref exposé sur l’histoire du waqf au Pakistan
Le Pakistan faisant partie de l’Inde britannique jusqu’au milieu du XXè siècle, le système waqf dans ce pays a conservé de nombreuses caractéristiques de cette situation en Inde et de son mode d’administration.
En 1959, le gouvernement du Pendjab a promulgué l’ordonnance sur les propriétés Waqf du Pakistan occidental, ce qui lui accordait le droit de déposséder les mutawalli (administrateurs du waqf). Ces derniers étaient remplacés essentiellement par des bureaucrates sans fondement religieux et n’étaient guère conscients des implications religieuses de leurs positions. De cette façon, l’autorité du saint musulman a été remplacée par le bureaucrate anonyme. Selon les règles, les dotations devaient passer entre les mains de l’État en violation évidente de la loi islamique.
Les principaux motifs de centralisation des awqaf étaient d’une part d’ordre religieux car ils étaient souvent associés à des activités religieuses ; l’État pouvait ainsi surveiller les ressources financières du culte, et d’autre part, cela privait les établissements religieux de toute autonomie. De telles interventions gouvernementales, quelle que soit leur cause, ont naturellement provoqué des réactions. Il y a eu, en effet, une douzaine d’appels contre les interventions du Département, poursuivis jusqu’à la Cour suprême jusqu’à la fin de 1985. Sur les 12 requêtes, 9 ont été rejetées. Mais la critique la plus franche de la politique gouvernementale a été exprimée par le Conseil de l’idéologie islamique (CII), qui a protesté contre les confiscations comme étant directement en opposition avec la loi islamique. Il va sans dire que le CII a exigé une annulation immédiate des confiscations. Ces arguments, cependant, n’ont pas trouvé de résonance dans les politiques gouvernementales, qui voulaient limiter l’influence des titulaires de waqf.
L’administration gouvernementale des Awqaf, plus communément appelée Département awqaf, bénéficiait également du droit de modifier les programmes d’études des écoles religieuses mises en place par les awqaf. Après 1962, des centaines d’écoles waqf ont été placées sous le contrôle du Département d’Awqaf. Depuis cette date, le contrôle de l’État s’est développé au Pakistan. À la suite des écoles, les mosquées ont également été liées au Département afin que les sermons du vendredi soient contrôlés par les administrateurs. La nationalisation des awqaf a purement et simplement conduit à un enrichissement de la bureaucratie. L’État s’est donc approprié les revenus des awqaf tout en diminuant les dépenses de santé, d’éducation et d’infrastructure. Selon plusieurs statistiques, le Département Awqaf a été accusé de dissoudre les structures sociales traditionnelles sans chercher à les remplacer. L’ensemble du processus a été vivement critiqué comme une victoire du «secteur colonial» absorbant les dépendances autonomes, s’enrichissant, poussant son idéologie et légitimant tout cela par ses propres agents religieux.
C’est ainsi, qu’empreint des méthodes coloniales, le gouvernement s’est saisi des propriétés waqf afin de s’enrichir grâce aux revenus générés, mais aussi pour pouvoir légiférer et avoir une main mise sur les programmes d’éducation et de spiritualité et donc contrôler la population. Après 1971, ils ont été placés directement sous le gouvernement central. En 1976, le gouvernement du Pakistan a fédéralisé tous les départements provinciaux d’Awqaf par le biais de la loi de contrôle fédéral Awqaf. Mais cette politique de centralisation a été de courte durée et le pouvoir a été renvoyé aux provinces en 1979 par l’Ordonnance d’abrogation fédérale Awqaf.
De nos jours, le système d’awqaf est donc redevenu indépendant au pakistan.